Caroni, Martina
Autre(s) auteur(s): Prodolliet, Simone, Caritas Suisse

Danseuses et candidates au mariage

Aspects juridiques de la traite des femmes en Suisse
Lucerne, Caritas, 1996

Type

Disponibilité

,

Langue(s)

Publication / maison d'édition

  • Caritas

Pagination

  • [1-2], 3-128

Nombre de pages

  • 128

Description matérielle

  • Broché, collé.

Dimensions

  • 15 cm x 20 cm

Catalogue

  • rero

Autre(s) exemplaire(s) en Suisse

Autre(s) exemplaire(s) à l'étranger

  • Non renseigné

Edition(s) antérieure(s) ou postérieure(s)

  • Non renseigné

Ressources électroniques

  • Non renseigné

Mots-clés

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Résumé critique des parties introductives

La lecture des deux premières pages de l’introduction permet d’abord de découvrir que la question de la traite des femmes en Suisse est hautement genrée: toutes les personnes citées – pour avoir fait des recherches ou s’être préoccupées de la question – sont des femmes. Ensuite, il apparaît rapidement que la question de la traite des femmes est étroitement liée à celle de la migration; enfin, que ces deux questions sont également susceptibles de dévier vers celles de la discrimination : les auteurs mettent en garde contre les amalgames, car toutes les femmes d’apparence exotique – qu’elles travaillent dans l’industrie du sexe ou qu’elles soient mariées à des Suisses — ne sont pas nécessairement victimes de la traite des femmes ou du commerce matrimonial.

Ce n’est que dans la seconde partie de l’introduction, intitulée « aperçu de la problématique », qu’apparaissent les liens entre traite des femmes et danse. Il se trouve que la traite des femmes « objective » les femmes : elle en fait des objets. Et dans une certaine mesure, selon les enjeux et les perspectives, la danse peut elle aussi « objectiver » les femmes, ou tout au moins contribuer à le faire — et le contexte de la traite, précisément, aggrave le problème notamment en contribuant à pousser les femmes à la prostitution non volontaire.

Enfin, dans cette même seconde partie (point c.) apparait cette information : « L’expérience montre […] qu’une politique répressive, qui refuserait de délivrer des autorisations aux boîtes de nuit ou aux instituts de courtage matrimonial, qui supprimerait ou limiterait drastiquement les « visas d’artistes » ou — comme c’est le cas actuellement [1995] — qui interdise l’activité d’entraîneuse mais sans être accompagnée de mesures efficaces pour veiller au respect de cette interdiction, n’apporte pas grand chose […] ou ne donne lieu qu’à des résultats de surface. Les spécialistes de la pratique relèvent que les mesures répressives touchent avant tout celles qu’on aimerait protéger de l’exploitation ». Et de conclure : « en Suisse centrale, il y a déjà des sexclubs privés qui ont remplacé les clubs de nuits légaux pour répondre à la demande d’entraîneuses qui est restée la même. »

Résumé critique du corps du texte

La brochure est divisée en quatre parties : I. Introduction et survol de la problématique ; II. Efforts internationaux pour lutter contre la traite de femmes ; III. Analyse de la situation juridique suisse ; IV. Résumé des recommandations.

Dans la deuxième partie, il est relevé que les premiers arrangements internationaux visant à protéger les femmes de la traite datent de 1904. Implicitement, la Suisse, à en croire le rapport ici commenté, ne ferait donc pas partie des premiers pays soucieux de la question de la traite des femmes.

La troisième partie se concentre sur la réalité suisse au moment de la rédaction du rapport. Elle présente, entre autres, la définition du métier de danseuse de cabaret telle qu’elle figure, en 1995, à l’article 20 alinéa 3 (OLE). Il s’agit d’une « personne qui se produit dans un spectacle musical au cours duquel elle se dévêtit partiellement ou totalement. La danseuse doit présenter, chaque soir et à plusieurs reprises, son spectacle dans un établissement équipé d’une scène et d’une arrière-scène, c’est-à-dire garantissant des conditions adéquates à une exhibition devant un public » (p. 55).

Le rapport, dans sa troisième partie, présente les points positifs comme les points à améliorer en ce qui concerne les danseuses de cabaret et les femmes victimes de la traite.

Pour ce qui est des points positifs, le rapport salue le fait que les autorisations de travail délivrées aux artistes ne soient accordées par les autorités cantonales que dans le cas où la personne concernée se présente à elles. Cette exigence permet aux autorités de communiquer à l’employée toute la documentation nécessaire à la connaissance de ses droits, non seulement en matière de temps, mais également de conditions de travail (voir p. 56, notamment). Le rapport salue également qu’un montant salarial minimum ait été fixé par l’office cantonal de l’emploi, ce qui permet en principe d’éviter les retenues abusives, par exemple pour le logement. Il salue, enfin, que dans le Canton de Berne, les employeurs aient l’interdiction de tolérer (ou d’obliger) la consommation d’alcool des employées durant l’exercice de leur fonction (p. 73).

Pour ce qui est des points négatifs, le rapport déplore que les règles concernant l’autorisation de travail des danseuses de cabaret étrangères impliquent leur précarité. En effet, les autorisations prévues pour de tels emplois ne permettent par exemple pas aux femmes de travailler davantage que pendant huit mois sur vingt-quatre (voir p. 53 à 56, ainsi que 60, notamment). Si les femmes continuent de travailler au-delà de cette période, alors elles entrent dans l’inégalité.

Puis, le rapport souligne qu’entre les principes de la loi et la réalité de son application, il peut y avoir des différences. Par exemple, en dépit de la clarté du droit du travail, les contrats de travail des danseuses de cabaret sont très flous . En ce qui concerne le temps de travail, il est courant que les employeurs exigent des danseuses de cabaret leur pleine disponibilité au profit des « besoins de l’établissement ». Or cet usage n’est pas conforme au droit du travail. En effet, dans ces conditions, les jours de travail sont certes payés mais pas les heures supplémentaires ou les jours travaillés pendant les congés (puisque ces derniers ne sont pas fixés). En ce qui concerne les instruments de travail (article 327 CO), il est convenu en principe par le droit du travail que les employeurs en couvrent les coûts. Or les contrats des danseuses de cabaret ne prévoient généralement pas que les coûts de leurs vêtements d’artistes soient pris en charge, bien que qu’ils ne puissent pas être apparentés à des « vêtements habituels » (p. 77). Le rapport insiste également sur la difficulté de vérifier que l’ensemble des droits des danseuses de cabaret soient respectés étant donné le peu de moyens qui sont octroyés pour un tel objectif. Enfin, le rapport indique que « l’exploitant d’un cabaret qui contraint à la prostitution une femme engagée par lui comme danseuse de cabaret » est punissable par la loi (p. 98). De plus, il précise que « le fait que les personnes objets de la traite désirent ou non être protégées [par la loi ou les autorités] est sans importance pour la punissabilité de la traite d’êtres humains » (p. 96). Cette information est importante dans la mesure où elle permet d’éluder la question de savoir s’il y a consentement ou pas, lors des abus qui ont lieu à l’encontre des danseuses de cabaret, notamment quand il s’agit de transformer leur travail artistique en travail de prostitution.

Certes il existe probablement d’autre publication (voir par exemple Hanspeter Mock, « La nouvelle loi sur les étrangers et les danseuses de cabaret […] » in , 2003. Une seconde version du rapport, qui concernerait la situation de 2019, pourrait être intéressante afin de faire le point sur la situation. Cela dit, la thèse de doctorat Circulation migratoire de Romeric Thiévent, qui concerne elle aussi la situation des danseuses de cabaret en Suisse, en particulier étrangère, a peut-être cette fonction.

Critère de choix du livre pour le cataloque

Intérêt du livre pour la délicate question du lien entre danse, prostitution, précarité voire discrimination des femmes.

Contributeur(s)

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Remarques générales

Revu par FM, juillet 2020.

Remarques sur la rédaction

Février 2019. Revu par FM, juillet 2020.